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Mmmm ! Probablement le plus mauvais jour des vacances. Mon choix d'aller voir les sources de l'Arc n'était pas très inspiré. Certes, nous avons vu les sources, mais le décor n'est pas des plus folichons. Nous aurions plutôt dû prendre les sources inférieures pour un dénivelé équivalent et une même durée d'autant plus qu'au bout se trouvait un lac. Mais reprenons dans l'ordre... Le temps est splendide. Les nuages d'altitudes se sont enfin décidés à quitter les hauts sommets. Nous partons en direction de Bonneval. Ce village se situe après Lanslebourg en direction du col de l'Iseran, où le premier village après le col si vous venez de la Tarentaise. Dans un virage en épingle, sur notre droite, la route en direction du hameau l'Écot est bien indiquée. La route est en bon état mais très étroite. Elle sinue durant 5 kilomètres dans les alpages fleuris. A notre arrivée, le parking est déjà bien rempli. Il reste encore quelques places. Il est vivement conseillé d'arriver avant 10 heures pour ne pas avoir de mauvaises surprises. Il faut dire que c'est aussi le lieu de stationnement pour les personnes se rendant au glacier des Evettes et aux gorges de la Reculaz, qui devraient faire prochainement l'objet de notre visite, mais aussi à la visite du hameau qui a retrouvé une seconde jeunesse (voir en bas de page). Nous prenons en direction de la Duis sur une route carrossable mais réservée strictement aux riverains. La pente est douce et nous remontons par la rive droite de l'Arc. Les champs n'ont pas encore été fauchés, l'herbe est haute mais de temps en temps, une tête de marmotte surgit avant de se cacher. Nous entrons aussi dans le parc de la Vanoise. C'est une promenade agréable pour ceux qui ne peuvent marcher plus. Nous mettons 40 minutes pour parvenir à la Duis. Sur notre itinéraire, nous rencontrons le sentier qui conduit au refuge du Carro (Lac Noir et Lac Blanc). Encore 250 mètres et le sentier commence à s'élever. Il est 11h45. Cela fait maintenant 1h15 que nous marchons. Nous parvenons au carrefour. Vers la gauche, direction les sources supérieures et sur la droite direction les sources inférieures. La durée est identique mais le sentier est différent. Les sources supérieures s'atteignent par un sentier en forme de marches d'escalier, mais avec de la verdure, des fleurs et de la terre. Les sources inférieurs s'atteignent par la crête d'une moraine, véritable épine dorsale qui, de notre position, semble sans fin. Nous prenons par la gauche. Le sentier est difficile et le dénivelé important. Derrière nous, la vallée s'ouvre. Ce décor est une petite récompense des efforts. Il nous faudra 1h30 pour parvenir à notre but, au 2750 mètres des sources du lac. Hélas, le paysage est maigre. Quelques névés sont bien accrochés en hauteur mais point de glaciers. Nous nous demandons ce que nous faisons ici perdus au milieu de nulle part ; quasiment pas de randonneurs, à part ce couple qui semble lui aussi s'être égaré en suivant la carte IGN. Le vent froid n'incite pas à la rêverie. Avec de la chaleur, nous aurions apprécié différemment le ruissellement de l'Arc, le calme des sommets environnants et nous aurions pu jumeler tranquillement pour traquer les bestiaux locaux. Rien de tout cela et c'est assez rapidement que nous quitterons ces lieux inhospitaliers. Initialement, nous comptions redescendre par le même chemin. Déçus par ce que nous avons vu, nous décidons de nous rendre au lac des sources inférieures. La carte IGN ne comporte pas de sentier, mais notre livre nous indique que l'on peut couper. Cependant, les indications sont données à partir du lac, pas à partir de notre position. Soucieux de ne pas se trouver bloquer plus haut, nous prendrons trop au sud. Tout en descendant, un chamois s'enfuit ! Nous ne le reverrons plus, pas plus que ces congénères, préoccupés que nous sommes à nous diriger du mieux possible. Nous marchons à travers les rochers en prenant comme objectif la fameuse moraine. Cela nous contraint à remonter de nouveau vers les 2720 mètres mais nous assurons ainsi le trajet. Il est préférable d'être prudent et de ne pas venir gonfler les statistiques des accidents en montagne. Nous rejoignons la moraine. Notre fille, souffrante, préfère nous attendre à l'abris d'un rocher. Nous gravissons la moraine pour, enfin, 1h30 après notre départ, trouver le lac. Si d'aventure vous vouliez faire comme nous, lorsque vous êtes aux sources supérieures, prenez la direction sud est, mais attention, c'est du hors piste ! Faites confiance à votre flair mais aussi à votre carte. Sans elle, inutile de tenter le diable ! Le lac est dans la pellicule, enfin sur la carte flash. Nous pouvons rebrousser chemin et descendre la fameuse moraine, avec toujours le vent d'ouest, violent et encore froid. Comme nous le devinions le matin, elle est interminable. Heureusement que devant nous la grandeur du panorama donne un peu de courage. C'est l'un de ces moments où on se demande ce que l'on fait dans cette galère. Sur notre droite l'Arc est devenu un torrent tumultueux qui a creusé son lit dans la roche. C'est en bas de la moraine que les deux bras de l'Arc ne forme plus qu'un. Revenus à une altitude plus basse, le vent a disparu. La fin d'après midi est agréable mais il reste du chemin à parcourir. Il ne faut pas trop traîner en route pour ne pas se laisser gagner par la fatigue. Il nous faudra 1h30 pour retrouver le véhicule, au parking de l'Écot, les jambes bien lourdes. L'Écot (2 046 m d'altitude) était jusqu'en 1968 le plus haut hameau de France habité à l'année. Comme Bonneval-sur-Arc, le caractère pittoresque de son architecture, bel exemple d'adaptation aux contraintes du milieu, lui vaut d'être classé depuis 1971. La production de fromage des alpages, tel le Bleu de Bonneval, illustre aussi cette capacité d'adaptation. L'origine des villages d'altitude À partir du XII° siècle, la France connut une croissance démographique forte qui obligea les populations à mieux exploiter leur environnement. Après avoir longtemps inspiré méfiance et crainte, la montagne fut peu à peu investie par des populations agropastorales. Cette occupation régressa avec les débuts de l'industrie au XIX°, puis la mécanisation motorisée et l'industrialisation des pratiques agricoles après la seconde guerre mondiale Le hameau de l'Écot comptait 112 âmes en 1734, 60 en 1886 et une seule en 1968 ! Aujourd'hui, il n'est habité que l'été. Un habitat adapté La forme de l'habitat, tel qu'il subsistait dans les années 1950-60, résulte du climat, des matériaux disponibles et des activités humaines. Avec de faibles moyens techniques, les futurs occupants édifiaient, à l'abri des avalanches, des bâtiments capables d'abriter la famille, le troupeau et les réserves de foin pour affronter les 8 mois d'hiver. Les matériaux étaient prélevés localement : le bois, rare en Haute Maurienne, était réservé aux charpentes, la pierre, aux murs et toitures et l'éventuel mortier était un mélange de sable issu des torrents et de chaux produite à partir de calcaire porté à haute température. La toiture, peu pentue pour conserver la neige comme isolant thermique, avait de faibles débords, pour éviter prise au vent. Cette lourde charge était portée par d'épais murs percés de rares et petites ouvertures pour minimiser les déperditions de chaleur. Le rez-de-chaussée comportait un espace de vie commun, séparé de l'étable par une mangeoire en bois qui, une fois fermée, devenait banc. Cet espace donnait accès à la cave. La cheminée servait à cuisiner et fabriquer le formage dans un chaudron suspendu à une potence. Les lits se trouvaient près de l'étable et fermés par des rideaux, ou au-dessus de l'étable, au milieu du foin, qui occupait tout l'étage sous le toit et renforçait ainsi l'isolation thermique. Le Bleu de Bonneval, de l'humilité au renom Le Bleu de Bonneval est un fromage persillé, veiné de vert-sombre qui est affiné durant 4 à 6 semaines. A l'origine, il était issu d'un mélange de laits entiers de vache et de brebis, avec préparation, la veille, d'un lait de maturation ensemencé de moisissures et de ferments. L'augmentation des troupeaux d'ovins sur Bonneval et Bessans à la fin du XVII° et au début du XVIII° serait à l'origine de l'importation de cette technique de fabrication en Haute Maurienne. De nos jours, seul le lait de vache est utilise. Anciennement manuelle, familiale et estival, sa fabrication s'effectue aujourd'hui tout e l'année, à la fromagerie de Bonneval. Sa production (28 T en 2003 et 32 T en 2004), réservée hier à une consommation familiale se trouve aujourd'hui en bonne place dans les caves des fromagers. L'agriculture hier et aujourd'hui L'agriculture de montagne actuelle résulte de la modification des pratiques suite à la déprise agricole, à la mécanisation des outils et au changement des productions. Dans les hautes vallées, comme à Bonneval, l'agriculture est, plus qu'ailleurs, tributaire de la nature et du climat. En effet, les 8 mois d'hiver, l'enneigement prolongé et la qualité des terres n'autorisent aucune culture apte à rivaliser avec les rendements de plaine. Ainsi, l'agriculture est tournée vers l'élevage, surtout laitier. L'exploitation Ce système repose sur différentes composantes. Le troupeau de vaches de race Tarine et abondance permet de fabriquer surtout le Beaufort et plus localement le Bleu de Bonneval. Durant la belle saison, il effectue la " remue " : il suit la pousse de l'herbe en montant, pou revenir à l'étable avec les premières neiges. A traite, effectuée deux fois par jour, est réalisée en été au bas des alpages grâce à des salles de traite automatiques et tractées. Le lait, stocké dans des citernes arrimées sur des véhicules tout terrain ou derrière les tracteurs, rejoint la coopérative. Situé près du village, le siège d'exploitation comporte une étable ou le troupeau passe l'hiver, et des granges pour stocker le foin nécessaire à l'alimentation. Les prairies des alpages sont des pâturages d'été. Tous les alpages d'une même exploitation, souvent contigus, forment " la montagne ". Ils sont souvent clôturés pour suppléer au gardiennage. Grâce aux coupes successives de l'herbe l'été, les prairies de fauche fournissent les réserves de foin. Celles-ci conditionnent le nombre de bêtes gardées durant l'hiver. Elles se cantonnent surtout aux endroits à faible pente permettant la fauche en tracteur. Par contre, certaines prairies de qualité supérieure, situées sur des pentes plus fortes, sont aussi fauchées avec des engins manuels comme les moto-faucheuses. Des luges et des câbles... Autrefois, le fourrage de ces prairies d'altitude était principalement stocké sur place dans les granges et redescendu durant l'hiver selon les besoins du bétail. Plusieurs techniques furent employées :
Les trousses de foin glissaient le long de filins, pouvant atteindre des longueurs impressionnantes, variant de 300 à 1500 m. Avec l'abandon de certains secteurs de fauche d'altitude, comme en vallée d'Avérole, et l'ouverture de la route du col de l'Iseran, les câbles à foin tombèrent en désuétude. Actuellement, seul un agriculteur de Bonneval les utilise encore pour descendre quelques 10 tonnes de foin de son alpage de la Feiche. |